Action n°147 : betransparent.be : initiative méritoire mais insuffisante

Betransparent.be est une nouvelle initiative d’autorégulation du secteur des soins de santé. Elle a pour objet de promouvoir la transparence des relations entre l’industrie et les professionnels et organisations du secteur de la santé. betransparent.be y répertorie en effet de manière claire et simple des rémunérations (ou plus précisément « transferts de valeur ») entre l’industrie et les professionnels et institutions du secteur de la santé et ce, “dans l’intérêt du patient.”

Voir la critique du GRAS : Que faut-il penser du site betransparent.be ?

SUITES (8/2022 LLG N°123) –

Open Pharma :

Open Pharma est une enquête collaborative menée par quatre médias belges sur les liens financiers entre l’industrie pharmaceutique et les professionnels et organisations du secteur de la santé, publiée du 27 au 30 avril 2022, dans  quatre médias belges (De Tijd, Knack, Le Soir et Médor).

Sur les quatre années étudiées (2017 à 2020), les entreprises du secteur pharmaceutique et les fabricants de dispositifs médicaux (prothèses, pacemakers…) déclarent avoir versé 875,5 millions d’euros à près de 32.000 professionnels et organisations des soins de santé basés en Belgique. 520 millions sont destinés à financer la recherche et le développement. Ce qui en fait le poste le plus important dans betransparent.be, la base de données rassemblant les déclarations de flux financiers entre industrie pharmaceutique et le monde de la santé. , Elle permet à quiconque, via un petit moteur de recherche, de vérifier pour une année donnée les liens financiers existant entre des firmes et un praticien, une association de malades ou une organisation professionnelle, qu’il s’agisse d’honoraires ou de sponsoring. Si la plateforme a été créée à l’initiative de l’industrie, les conditions de déclaration ont été fixées dans un cadre légal: le Sunshine Act.

BeTransparent.be, pas si transparent :

Pour les dépenses de recherche et de développement, les firmes ne sont pas tenues de déclarer qui est le bénéficiaire des montants investis, seulement le montant total (agrégé).

La mémoire de betransparent est limitée légalement à trois ans. Un nouveau droit à l’oubli ?

Les rabais négociés par les hôpitaux lors de l’achat de médicaments ou d’implants ne doivent pas non plus être déclarés même si les hôpitaux sont tenus maintenant de réaliser des appels d’offre pour marchés publics pour certaines commandes (les médicaments biosimilaires p.ex.)

Le sponsoring ne se fait pas toujours en ligne directe mais peut se camoufler derrière une société ou un hôpital alors que la loi impose que ce soit le nom du bénéficiaire final qui apparaisse dans le registre.

Parfois la confusion se fait entre deux catégories de bénéficiaires organisations de patients» versus «organisations du secteur de la santé») ou les déclarations se révèlent incomplètes avec de (très) nombreuses erreurs d’encodage.

80% des 70 millions d’euros versés à des organisations de patients basées en Belgique le sont en fait à des associations européennes employant plusieurs dizaines de lobbyistes auprès des institutions européennes.

L’enquête critique aussi la gestion des conflits d’intérêts des experts siégeant dans différentes commissions fédérales santé : commission de remboursement des médicaments à l’INAMI, commissions Covid19, conseil supérieur de la santé.

In fine, il n’y eu aucun contrôle sur le respect de ces obligations légales de transparence depuis l’entrée en vigueur de cette obligation de déclaration en 2017. Les sanctions relèvent de la compétence de l’AFMPS (Agence Fédérale des Médicaments et des Produits de Santé) qui confirme que ce n’est pas une priorité pour elle en matière de santé publique sur la base d’une analyse des risques.

Il n’existe, actuellement, aucun cadre européen organisant la transparence. Cfr BMJ 12/2021

Autant de raisons de découvrir cette minutieuse enquête dans Médor  ou le Soir